Les Menier et le parc Monceau : une histoire de famille

Façade du 4 avenue Ruysdaël ; © FDD
Façade du 4 avenue Ruysdaël
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Colonnade du parc Monceau
Colonnade du parc Monceau
Hôtel d'Emile-Justin Menier (détail) ; © Philippe Cendron
Hôtel d'Emile-Justin Menier (détail)
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Hôtel d'Henri Menier
Hôtel d'Henri Menier
Jean-Antoine-Brutus Menier ; © DP
Jean-Antoine-Brutus Menier
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Vue aérienne de l'usine Menier
Vue aérienne de l'usine Menier
Emile-Justin Menier
Emile-Justin Menier
Moulin de la chocolaterie Meunier ; © Myrabella / Wikimedia Commons / CC BY-SA 3.0
Moulin de la chocolaterie Meunier
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Le personnel devant l'usine Menier
Le personnel devant l'usine Menier
Henri Menier
Henri Menier
Gaston Menier
Gaston Menier
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Conservée à la BnF

Albert Menier
Albert Menier
Le chocolat Menier
Le chocolat Menier
Le chocolat Menier
Le chocolat Menier
Entrepôt pour le chocolat Menier
Entrepôt pour le chocolat Menier

Avant de devenir le siège social de l’Ordre national des Pharmaciens, le 4 avenue Ruysdaël est, à la fin du XIXe siècle, l’hôtel particulier de Gaston Menier, manufacturier-chocolatier, digne héritier de son grand-père Jean Antoine Brutus, d’abord simple droguiste, puis diplômé pharmacien.

Le parc Monceau

Territoire de chasses royales perdu dans les champs, les bois et les vignes du village de Mousseaux, l’actuel parc Monceau est né de la volonté de Louis-Philippe d’Orléans, duc de Chartres, qui y fait aménager un pavillon entouré d’un charmant jardin au début des années 1770. On l’appelle bientôt la « Folie de Chartres ».

Confisqué à la Révolution, rendu aux Orléans, repris par l’État au milieu du XIXe siècle, le parc est partagé : la Ville de Paris en aménage une partie en jardin public, tandis que l’autre est vendue au banquier Émile Pereire. Avec son frère Isaac, ce dernier y réalise une importante opération immobilière.

Les hôtels Menier

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les Menier « colonisent » les abords du parc Monceau. Le fils de Jean Antoine Brutus Menier, Émile-Justin (1826-1881), fait construire un somptueux hôtel particulier au 5 avenue Van Dyck par Henri Parent, à partir de 1872.

Son fils Henri (1853-1913) s’établit quant à lui au 8 rue Alfred-de-Vigny. Il fait également appel à Henri Parent, en 1880.

Son deuxième fils, Gaston (1855-1934), achète le 4 avenue Ruysdaël. Il quitte l’hôtel à la mort de son épouse en 1892 pour aller s’installer dans un hôtel plus vaste à quelques pas de là, au 61 rue de Monceau, hôtel qui appartenait auparavant à la famille Camondo.

Qui sont les Menier ?

Jean Antoine Brutus Menier : l’aventure industrielle

Pharmacien surnuméraire dans les armées napoléoniennes, Jean Antoine Brutus Menier (1795-1853) n’a que vingt ans lorsqu’il aborde la vie civile en 1815. Ses études au Prytanée de La Flèche, son stage à la pharmacie de cette école, puis son affectation au service Santé de l’armée le conduisent à s’intéresser à la préparation des drogues.

Constatant que de nombreux obstacles s’opposent à ce que les pharmaciens puissent préparer tous les produits pharmaceutiques, il décide dès 1816 de fonder une maison de droguerie destinée à présenter aux pharmaciens un établissement central universel d’approvisionnement. Les débuts parisiens sont modestes, mais l’achat d’un moulin sur la rivière Marne, à Noisiel, lui permet bientôt, grâce à une énergie hydraulique importante, de développer considérablement son métier de droguiste.

La consécration professionnelle

Malgré une reconnaissance de la communauté scientifique et technique de l’industrie, Jean Antoine Brutus Menier n’est pas maître chez lui. Il agit sous tutelle. Ses fabrications sont en effet dirigées par des collaborateurs diplômés. Aussi décide-t-il de reprendre ses études pour devenir pharmacien. À 44 ans, il passe avec succès ses examens.

La consécration professionnelle arrive en 1851 à l’Exposition universelle de Londres, lorsque la concurrence française lui rend hommage en la personne du pharmacien François Dorvault : « Menier a fondé à Noisiel-sur-Marne, il y a déjà de longues années, une usine hydraulique pour la pulvérisation des substances médicinales qui n’a point d’analogue en Europe, et par son importance et par la perfection des produits qui en sortent. »

De la pharmacie au chocolat

Avec la deuxième génération de Menier, la production pharmaceutique, née modestement à Paris dès 1816, développée à partir de 1825 à Noisiel puis à Saint-Denis, est abandonnée.

Comme l’a fait son père pour les spécialités pharmaceutiques, Émile-Justin Menier consacre toute son énergie et son intelligence à la fabrication du chocolat. Il développe le site usinier des bords de Marne. Pour ce faire, il s’entoure de techniciens compétents : l’hydraulicien Louis-Dominique Girard, le chimiste Marcelin Berthelot, le frigoriste Charles Tellier. L’architecte Jules Saulnier construit une série de bâtiments et édifie un nouveau moulin destiné au broyage du cacao. Innovation et luxe caractérisent sa réalisation : ossature métallique porteuse et décor de céramique pour tous les parements extérieurs.

L’entreprise dévore le village. Une cité ouvrière est créée. Noisiel devient le théâtre permanent d’expériences professionnelles et sociales.

Pour protéger l’avenir des établissements Menier, Émile-Justin et ses trois fils, Henri, Gaston et Albert, créent en 1879 une société en nom collectif. C’est ainsi qu’au décès de leur père en 1881, les trois fils assureront la cogérance de l’entreprise.

La plus grande chocolaterie du monde

Pour fabriquer du chocolat, il ne faut, serait-on tenté de dire, que du cacao et du sucre. Mais pour ces deux éléments de base, il faut des qualités particulières, afin d’obtenir une production irréprochable.

Pour ce faire, les établissements Menier possèdent des plantations de cacaoyers au Nicaragua, d’importantes cultures de betteraves et des stations de raffinage du sucre. À Noisiel, de nombreuses machines assurent la presque totalité des opérations nécessaires à la fabrication du chocolat.

La société est présente à l’étranger avec de nombreux comptoirs et des usines à Londres et à New-York. La chocolaterie Menier devient la plus grande du monde.

Vers un empire triomphant

Premières fabrications pharmaceutiques à Paris, importante production chocolatière et expériences professionnelles et sociales à Noisiel, vastes plantations de cacaoyers au Nicaragua, usines et points de vente à Londres et New-York sont autant d’activités qui conduisent la modeste entreprise familiale vers la plus grande chocolaterie du monde.

Les Menier s’impliquent ainsi dans la vie économique et sociale de la France et ne s’arrêtent pas là : ils exercent des responsabilités politiques, possèdent des journaux, président et administrent des organismes professionnels, soutiennent des œuvres de bienfaisance, participent à des sociétés locales…

Grâce à leur empire du chocolat, mais aussi à leurs multiples demeures en France et à l’étranger, à leurs passions pour la chasse ou le yatching, à leurs relations, les Menier intègrent bientôt la grande bourgeoise industrielle française.